Le Hoggar, dans le désert du Sahara, au sud de l’Algérie, est le lieu le plus significatif de Charles de Foucauld : c’est là qu’il vient s’installer en 1905, dans ce petit village de Tamanrasset composé alors d’une vingtaine de huttes. Charles y vivra les 11 dernières années de sa vie jusqu’à sa mort le 1° décembre 1916, et ce seront pour lui, les années de plus grand murissement spirituel mais aussi humain. Il vivra un déplacement et une conversion intérieure en entrant de plus en plus en dialogue avec la culture et la mentalité de la population, désirant ardemment être reconnu comme leur frère par une vie de bonté fraternelle . Cela marquera non seulement sa vie, mais l’Église tout entière dans son approche dans le dialogue avec les autres religions et cultures. Les « martyrs d’Algérie » qui viennent d’être béatifiés, sont les témoins de son influence.
Sur le plateau de l’Assekrem, à 2 800 m d’altitude, dans un environnement extraordinaire de montagnes rocheuses et de vallées, Charles se fera construire un petit « ermitage », non pour se retirer, mais bien au contraire pour aller à la rencontre des Touaregs qui y font pâturer leurs troupeaux de chameaux et de chèvres. Ce spectacle depuis le plateau de l’Assekrem qui faisait jaillir chez Charles des chants de louanges et d’action de grâces au Seigneur pour tant de beauté, reste toujours aussi merveilleux, faisant monter des touristes européens et algériens pour admirer les levers et les couchers de soleil, cette visite deviendra pour beaucoup une expérience spirituelle.
Par contre, Tamanrasset est devenue une capitale administrative et militaire, de plus de 150 000 habitants ; c’est une ville cosmopolite avec une population qui s’est beaucoup diversifiée. Toute l’Algérie et toute l’Afrique se retrouvent ici. Les années noires du terrorisme (1992 à 2000) ont poussé beaucoup de gens du Nord à chercher plus de tranquillité par ici. Les gens du terroir sont Harratins, Touaregs et côtoient des Algériens venant de toutes régions du pays : Arabes, Kabyles, Mozabites…Tamanrasset est, d’autre part, un des centres principaux de passage de migrants subsahariens. On distingue les frontaliers : Nigériens, Maliens, venus pour le travail, au gré d’un va-et-vient très fluctuant ; et les autres subsahariens, d’origines très diverses, qui espèrent aller vers l’Europe. Ils représentent un des défis de notre monde d’aujourd’hui. Ils sont les pauvres les plus visibles de cette ville.
Les frères et les sœurs de la Famille Charles de Foucauld, ont désiré très vite, dès le début des années 1950, revenir à l’endroit même où Charles a vécu et est morts. Les frères ont restauré son ermitage à l’Assekrem, et ont construit plusieurs autres petits ermitages, dont un grand ermitage pour deux personnes, pour les petites sœurs du Sacré Cœur.
A Tamanrasset, il y a une fraternité où vivent actuellement 3 petits frères de Jésus, et une fraternité des petites sœurs du Sacré Cœur avec, pour l’instant, seulement une petite sœur. Leur désir est de vouloir maintenir dans ce lieu-source leur présence d’amitié et de prière au milieu d’une population essentiellement musulmane.
Pour répondre aux défis et aux grands bouleversements qu’ont vécu Tamanrasset ainsi que toute l’Algérie, les frères et les sœurs ont dû évoluer et adapter leur forme d’insertion, au long des années. Mais l’esprit reste le même : celui de Charles de Foucauld voulant vivre comme Jésus à Nazareth, et, très concrètement, dans le Hoggar qui a été le cadre de ses onze dernières années sur cette terre, une présence amicale, solidaire et fraternelle au milieu des musulmans.
L’Église d’Algérie se veut imprégnée de cette culture évangélique dans un esprit d’ouverture et de dialogue : c’est une Église de la RENCONTRE qui vit le service, le partage, l’échange dans l’accueil et la solidarité. Pour l’Église universelle toute entière, c’est aussi un défi : elle est appelée à s’engager avec respect et sincérité dans le dialogue interreligieux et la pluralité, tout particulièrement avec l’Islam. A ce titre, Tamanrasset et l’Assekrem sont des lieux de vie forts de sens pour une présence chrétienne, et nous cherchons, petits frères et petites sœurs, à témoigner concrètement, de ces valeurs de solidarité dans le quotidien de nos vies, avec la population musulmane qui nous accueille, sans parler des nombreux migrants des pays subsahariens dont un certain nombre sont chrétiens. Tout cela prend sens dans la prière, l’Eucharistie, et tous les petits gestes de partage et de services…
C’est pour cette raison que comme famille spirituelle, nous – les Petits Frères de Jésus et les Petites Sœurs du Sacré-Cœur –, lançons un triple appel.