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Évangile selon Saint Matthieu 5,38-48


« Celui qui te demande, donne-lui. Celui qui veut emprunter de toi, ne lui refuse pas. » [5.42]

C’est encore tout naturel, tout simple, ce sont des devoirs évidents, — eux qui sont si contraires à la pratique du monde, — si tu considères qu’il faut traiter tout humain comme « ton frère », comme une portion de moi-même, comme mon enfant bien-aimé, comme un être que tu dois aimer comme toi-même et autant que je t’aime… Et ces devoirs doivent t’être d’une facilité infinie à remplir, n’être absolument rien pour toi, puisque pour être mon disciple, surtout pour m’aimer parfaitement, tu dois être absolument détaché de tout le créé et par conséquent de tout ce qu’on peut te prier de donner et de prêter…
Ils doivent t’être profondément doux à remplir, puisque je les ai remplis avant toi, que je les remplis encore sans cesse et que chaque fois que tu as l’occasion de les remplir, tu as la douceur ineffable, d’autant plus pénétrante que tu m’aimes davantage, de te rendre semblable à moi, de t’unir à moi en suivant mon exemple, en m’imitant…
Accomplis donc ces préceptes, ces commandements (ce sont des obligations et non des conseils, de même que les prescriptions précédentes), avec d’autant plus de zèle que je te les commande plus formellement, qu’elles sont plus étroitement liées à l’amour que tu me dois, qu’elles sont plus faciles à remplir et que si tu m’aimes, elles te sont profondément douces à pratiquer.
Songe encore, mon petit enfant : « Donne à qui te demande », et c’est un membre de mon corps, quelque chose de moi qui te demande. Si tu as la foi, avec quel bonheur tu donneras, comme tu souhaiteras à avoir à donner dès maintenant tout ce que tu as, puisque c’est toujours moi qui demande et toujours à moi que tu donnes… « Prête à qui le désire », c’est un membre de mon corps, quelque chose de moi qui te demande. Quelle félicité pour toi de pouvoir prêter, sans jamais réclamer, sans jamais redemander, sans rien espérer en retour : Me prêter à moi, quel bonheur, quelle joie de me prêter dès aujourd’hui tout ce que tu possèdes !… Si tu as la foi, comme ce commandement te sera ineffablement doux… Chasse les fantômes, bannis les monstres, les apparences ; vois les réalités, vois en chaque humain un membre de mon corps mystique… et comme la vie prendra une nouvelle face pour toi, comme une lumière nouvelle l’éclairera, dans quelle clarté rayonnante tu marcheras, comme dès ce monde tu te trouveras comme sur une « terre nouvelle » et « sous un ciel nouveau », nageant en pleine vérité, en pleine lumière divine, bien haut au-dessus des boues et des brouillards du monde, dans une atmosphère toute pure, toute lumineuse, toute paisible, toute chaude, toute embaumée, toute céleste[[C. DE FOUCAULD, Commentaire de Saint Matthieu. Lecture Commentée de l’Évangile, Nouvelle Cité, Paris 1989, pp. 261-262.]] !