Évangile selon Saint Luc 1,39-45
La Visitation
Que Vous êtes bon, mon Dieu !.. Vous êtes à peine dans ce monde que Vous commencez à le sanctifier ; Vous sanctifiez d’abord quelques êtres et ensuite Vous répandrez peu à peu Votre lumière sur tous. Par l’Incarnation Vous avez sanctifié Marie, par la Visitation Vous allez sanctifier St Jean et Sa famille, à Noël Vous sanctifierez les bergers et les mages ; à la Présentation Vous sanctifierez Siméon et Anne, parmi les docteurs Vous sanctifierez ceux d’entre eux qui ne repoussent pas la grâce qui sort de Vous… C’est Vous qui allez à Jean, Vous prévenez Vos serviteurs, comme le dit Sainte Élisabeth à la Sainte Vierge. « C’est moi qui vous ai élus, non vous qui m’avez élu », direz-Vous plus tard; c’est vrai pour tous les hommes, pour St Jean, le plus grand d’entre eux, et pour moi, le dernier des pécheurs. Oh ! mon Dieu, que Vous êtes bon ! Que Vous m’avez cherché ! Combien c’est Vous qui m’avez cherché, choisi et non moi qui Vous ai choisi et cherché ! Que Vous êtes divinement bon et de quelle gratitude attendrie je dois être plein, quand je songe à la manière dont, bon Pasteur, Vous êtes venu, porté par une autre Marie, franchissant tous les obstacles, comme jadis Vous franchîtes les monts et les vallées d’Israël, et Vous m’avez sanctifié sans que j’y fusse pour rien, faisant tout pour moi, Vous seul, avec l’aide de celle qui Vous portait, comme Vous faites tout pour St Jean, Seul avec Marie !.. Quelle bonté ! « C’est moi qui vous ai choisis, non vous… » Et dans ce choix, cette recherche, quelle force et quelle suavité !.. Non seulement Vous faites le bienfait des bienfaits, Vous donnez le bien suprême, Vous Vous donnez Vous-même, mais au milieu de quelles délicatesses, de quelles attentions d’une suavité infini ! Que Vous êtes divinement Bon !
Imitons Jésus… Allons au devant des âmes… Faisons ce que nous pouvons pour les sanctifier… C’est Lui qui les sanctifie, non les hommes. Il se fait porter par Marie auprès de ceux qu’il veut sanctifier. Maintenant Il veut sanctifier tous les hommes ; c’est pour tous les hommes qu’il est mort au calvaire.., C’est tous les hommes qu’il appelle à la foi, à l’amour, au salut : « Allez dans le monde entier prêcher l’Évangile à toute créature » ; soyons donc ses instruments comme l’a été Marie. Ce mystère est l’image des devoirs des contemplatifs envers les infidèles…
Notre-Seigneur nous a donné l’exemple de 3 vies qu’il a pratiquées Lui-même ; qui sont par conséquent toutes trois parfaites, toutes trois divines : la vie de Nazareth, celle du désert, celle de l’ouvrier évangélique… Nos devoirs envers les âmes du prochain, dans la vie d’ouvrier évangélique, consistent dans l’accomplissement de toutes les œuvres de zèle et de miséricorde pouvant procurer le bien des âmes ; dans la vie du désert, ils consistent à offrir pour lui à Dieu des prières, des pénitences, des mérites dans une grande séparation des hommes ; dans la vie de Nazareth, ils consistent, à l’égard de ceux au milieu desquels nous vivons habituellement, à leur rendre les offices d’édification et de charité que peuvent rendre à leurs voisins quelques âmes vivant très retirées, dans un grand recueillement et une grande pauvreté, dans l’obscurité et le silence; et à l’égard de ceux qui vivent loin de nous, à l’égard, par exemple, des peuples infidèles, à faire ce que Jésus fait faire ici à Marie ! Il se fait porter par elle au milieu de ceux qu’il veut sanctifier, et la fait rester parmi eux, l’entourant, l’ayant en elle et menant dans cette famille une vie parfumée de toutes les vertus évangéliques. Les devoirs de ceux qui vivent de la vie cachée de Jésus à l’égard des peuples infidèles sont de même de porter Jésus au milieu d’eux, Jésus dans la Sainte Hostie, et de rester parmi eux avec ce divin Jésus, L’y adorant et y menant une vie embaumée de tous les parfums de l’Évangile… Porter le Saint-Sacrement parmi les peuples infidèles, et y vivre à l’ombre du Tabernacle, en donnant à ces peuples, outre le bienfait infini de la présence de Jésus, le bienfait de l’exemple de la pratique des vertus évangéliques ; voilà le bien que peuvent faire aux âmes du prochain, aux âmes des peuples les plus éloignés de leur pays, et les plus éloignées de Jésus, ceux qui sont voués à la vie cachée… Et ce bien, non seulement ils peuvent le faire, mais ils doivent le faire, non tous, non toujours, mais ceux que Dieu y appelle, à l’heure où Il les y appelle, comme Marie, qui partit quand Dieu l’y invita… Ô mon Dieu, j’ai toujours cru que Vous aviez voulu cela de moi ; faites-le moi faire selon Votre volonté ! Faites-moi en tout faire votre volonté ! Amen[[M/261, sur Lc 1,39-56, en C. DE FOUCAULD, La bonté de Dieu. Méditations sur les Saints Évangiles (1), Nouvelle Cité, Montrouge 1996, 211-213.]].