• Temps de lecture :7 min de lecture
  • Post last modified:22 janvier 2019

Psaume 18B (LC 1, 1-4; 4, 14-21)


Dans cette seconde partie du psaume on s’élève des créatures au créateur, des beautés de la nature à celles de la loi divine… on monte les degrés de l’échelle des êtres… on va du matériel à l’immatériel… Quelle admirable échelle ! Que c’est beau de la monter ! De passer des créatures sans raison, si belles déjà et si harmonieuses, aux créatures raisonnables, à l’âme humaine devant laquelle toutes les autres beautés visibles s’effacent comme un néant, et de cette âme humaine si belle mais imparfaite à la plénitude des perfections qui ne sont en elles qu’en germe !.. C’est à Dieu même que nous montons dans ce psaume, car c’est à sa parole, à sa loi, à sa volonté, aux paroles qu’il a inspirées aux auteurs des saints livres, paroles créées, créatures et non Dieu même, mais certaines de ces paroles expriment des vérités éternelles, qui font partie de l’essence même de Dieu, de ses pensées éternelles… – Merci, mon Dieu, de nous donner cette leçon et de nous apprendre dans ce psaume à monter cette divine échelle des êtres.
« La loi de Dieu est immaculée, parfaite, elle convertit les âmes ; le témoignage de Dieu est fidèle, il donne la sagesse aux petits » il la donne aux humbles ; il la donne aussi aux ignorants à qui il suffit de connaître et pratiquer cette divine parole pour être infiniment sages, mille fois plus sages que les savants du monde ; il la donne aux enfants à qui il suffit de la pratiquer avec innocence, simplicité, amour pour être aussi sages que de sages vieillards… « Les commandements de Dieu sont justes, ils réjouissent les cœurs ; les préceptes de Dieu sont lumineux, ils éclairent les âmes »… Oui mon Dieu, votre joug est doux et léger et la seule joie de l’homme en ce monde est de le porter : il réjouit et lui seul peut réjouir : car faire votre volonté est la seule chose qui puisse donner à l’âme une joie pure et vraie dans cet exil… Elle illumine nos âmes… Ce n’est qu’en vos paroles que nous trouvons la lumière : votre volonté, vos paroles qui nous la font connaître, c’est la lumière de notre vie, la lumière qui nous est absolument indispensable. (Aussi sommes-nous obligés pour voir clair et d’obéir à un directeur interprète de vos volontés, et de méditer vos saints livres, pour nous imprégner de vos pensées, de votre esprit)… « La crainte de Dieu est sainte, elle durera éternellement : ses paroles sont vraies, elles se justifient elles-mêmes »… Oui, mon Dieu, votre crainte est sainte et durera toujours, parce qu’elle est indissolublement liée à votre amour… Nul ne craint plus que celui qui aime, et plus on aime plus on craint : on ne craint pas le châtiment, mais on craint de faire de la peine, on craint de déplaire, on craint de ne pas assez plaire, de ne pas assez prouver son amour, de ne pas faire tout ce qu’on devrait pour ce qu’on aime… On désire tellement faire tout ce qu’il faut auprès de ce qu’on aime, on redoute tellement la moindre désapprobation de sa part !.. L’être qu’on craint le plus au monde est celui qu’on aime : d’un regard il peut nous faire tant de peine ! « Mon Dieu, votre loi est plus désirable de beaucoup que l’or et que la pierre précieuse : elle est plus douce que le miel et que le rayon de miel. » Oh oui, mon Dieu : pour qui vous aime il est mille fois plus désirable de connaître votre volonté que d’avoir toutes les richesses ! Connaître votre volonté, que cela nous est doux ! « Votre serviteur l’observera : cette observation porte en elle-même sa riche récompense. » Car par elle on évite le péché, on évite ce que redoute le plus l’âme qui vous aime : de vous offenser, de vous déplaire. « Qui pourra comprendre la laideur du péché ! Purifiez-moi, mon Dieu, de tous mes péchés, de ceux que je connais et de ceux que je ne connais pas et que mes yeux ne voient pas. »…« Gardez-moi de ceux qui vous sont étrangers, des mondains : si les mondains ne me dominent pas, s’ils ne s’emparent pas de mon esprit, je suis sans tache et je serai sauvé d’un grand mal. Alors mes paroles pourront vous plaire et la méditation de mon cœur sera toujours en votre présence. » Oui, un de mes grands périls c’est l’esprit du monde : que les mondains ne me donnent pas leur esprit et j’échapperai à un grand péril : le monde c’est la concupiscence de la chair, celle des yeux et l’orgueil, dit saint Jean : sensualité, curiosité, orgueil. Le monde c’est la sagesse humaine, opposée à l’Evangile, à la sagesse divine qu’elle traite de folie… Le monde c’est l’égoïsme, l’avarice, l’incrédulité… Il cherche à pénétrer en nous par tous les côtés : il passe par-dessus les murs et au travers des portes closes : le démon nous souffle à toute heure cet esprit mondain ; les hommes nous le communiquent par la plupart des relations que nous avons avec eux ; et hélas dans notre propre fond nous le trouvons nous en sommes imprégnés et tout mouvement fait monter à la surface de notre âme cette boue qui repose en son fond… Gardons-nous-en de toutes nos forces et pour cela employons 1° la prière : supplions Dieu de nous rendre fous, fous de l’Evangile, fous de sagesse divine, qui sont folie aux yeux des hommes ; 2° la lecture et la méditation du saint Evangile : imprégnons-nous-en ; connaissons-le ; que ses maximes viennent sans cesse à nos lèvres et remplissent nos esprits et nos cœurs ; 3° la sainte pauvreté : elle est l’opposé de l’esprit du monde : plus nous la cultiverons, plus nous nous éloignerons du monde, et plus le monde qui l’a en horreur, s’éloignera de nous ; 4° l’abjection: on peut dire d’elle tout ce que nous venons de dire de la pauvreté ; 5° la solitude : moins nous verrons les hommes, moins ils pourront nous donner leur esprit ; 6° la pénitence ; 7° les lectures pieuses : les livres écrits par des saints, et par conséquent pleins de l’esprit de Dieu, d’un esprit opposé à celui du monde ; et l’histoire des saints, c’est-à-dire l’histoire d’âmes qui ont été ennemies du monde et qui ont mené une vie toute opposée aux maximes mondaines, dont les exemples sont ceux d’une guerre mortelle contre le monde ; 8° dans les manières de faire, de dire, de penser, s’éloigner de la manière d’être des gens du monde : par là on déclare nettement qu’on n’est pas du monde : on se déclare en état de guerre avec lui: ce moyen est très puissant; mais quelle persévérance et quelle foi il faut pour le pratiquer habituellement ! 9° par-dessus tout l’amour de Dieu : c’est lui qui chasse de notre âme tous ces fantômes, toutes ces folies d’idées mondaines, lui qui nous illumine, nous donne l’intelligence, nous fait concevoir la vérité, nous donne l’horreur des vanités, des sensualités, des curiosités, des biens terrestres, lui qui nous fait regarder le monde entier et tout ce qu’estime le monde comme de la boue, et ne nous fait estimer qu’une chose, notre sauveur Jésus, ses exemples et ses paroles que nous aimons aussi passionnément que nous méprisons profondément tout le reste : in lumine tuo videbimus lumen. « C’est à la lumière de votre amour que nous verrons la lumière », ô Jésus, « mon Seigneur, mon soutien et mon Rédempteur ! » [[M/36, sur Ps 18,8-fin, en C. DE FOUCAULD, Méditations sur les psaumes, Nouvelle Cité, Montrouge 2002, pp. 103-107.]]