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Évangile selon Saint Marc 12, 28b-34

« Aime Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit, de toutes tes forces ; voilà le premier commandement

Mon Dieu, que Vous êtes bon de nous donner pour premier, pour plus grave de tous les commandements, le plus doux que, même Vous, ô mon Dieu, dans Votre sagesse et votre Toute-Puissance puissiez inventer et donner… Nous permettre de Vous aimer, ô Être infiniment gracieux et l’amabilité même, ce serait déjà la grâce des grâces et la faveur des faveurs; mais nous l’ordonner, bien plus, nous l’ordonner sous les peines les plus sévères, des peines terribles et éternelles, ô Jésus, mon amour, c’est de Votre part le plus grand amour, c’est de Votre part ce qu’il y a de plus surhumain, de plus céleste, de plus divin en amour !.. Oui, ô Bien-aimé Jésus, tout Dieu que Vous êtes, Vous ne pourriez rien trouver de plus doux, de plus tendre, de plus suave, de plus plein de bonté, de plus amoureux que de nous faire ce commandement de Vous aimer de tout notre être sous peine des plus terribles châtiments ! Merci, merci, merci, de tout mon être, merci !
Aimons Dieu de tout notre cœur ; c’est-à-dire : 1° de toute notre volonté voulons le bien de Dieu ; oublions-nous radicalement nous-mêmes et ne voulons, ne cherchons qu’une chose au monde, n’agissons, ne parlons, ne pensons qu’en vue d’une chose au monde : le bien de Dieu (c’est-à-dire la manifestation de la gloire de Dieu) ; 2° comme par la volonté de Dieu, le désir de notre propre bonheur est nécessairement et involontairement attaché à notre nature, ne mettons notre propre bonheur que dans le bonheur de notre Bien-aimé, aimons-Le assez pour nous oublier nous-mêmes et nous trouver parfaitement heureux puisque Dieu est parfaitement heureux (comme les Saints et les anges) ; 3° comme par la volonté de Dieu, le désir, le besoin de l’union est nécessairement et involontairement attaché à l’amour, désirons toujours être unis à Dieu de toutes les manières possibles, et par l’amour de notre cœur, et par l’amour du Sien pour nous (c’est-à-dire par la grâce sanctifiante, par l’état de grâce), et par notre sanctification (qui augmente Son amour pour nous et le nôtre pour Lui), et par notre conformité à Sa volonté, et par notre parfaite imitation de Sa vie intérieure et extérieure (l’imitation est un des degrés de l’union), et par notre obéissance à Sa volonté, et par Sa possession dans la Sainte communion, et par la connaissance de Sa vie et de Sa doctrine, et par notre amour pour tout ce qu’il a aimé (pour tous les hommes et pour l’Église surtout), et par Sa vue dans le ciel…
Aimons Dieu de tout notre esprit ; en occupant notre esprit continuellement de Lui, en Le contemplant aussi continuellement que cela nous est possible (la perfection en cela est du ciel, non de la terre, mais nous devons tâcher de nous en rapprocher autant que possible), et en appliquant notre intelligence à connaître et à faire Sa volonté aussi parfaitement que possible, (Sa volonté c’est nécessairement « Son bien », « la manifestation de Sa gloire »)… Aimons Dieu de toute notre âme en faisant tous nos efforts pour rendre notre âme aussi conforme que possible à la Sienne (l’orner des mêmes vertus, y mettre les mêmes sentiments, les mêmes désirs, les mêmes joies et les mêmes peines, la remplir des mêmes pensées, des mêmes manières de voir, des mêmes goûts… En un mot rendre notre âme, notre vie intérieure aussi conforme que possible à celle de notre divin Époux)…
Aimons Dieu de toutes nos forces ; de tout notre être, de toutes nos puissances, de tout ce qu’il y a de force dans notre âme et dans notre corps (que notre corps travaille à la manifestation de la gloire de Dieu comme le corps de Jésus y a travaillé ; qu’il y soit uniquement consacré, qu’il serve uniquement à cette seule fin comme le corps de Jésus a servi à cette seule fin ; qu’il jeûne, veille, souffre, se fatigue, travaille, fasse tout ce qui glorifie Dieu, porte la croix que Dieu lui impose, serve en tous ses instants à glorifier Dieu le plus possible)… Enfin que notre corps et notre âme tout entière, notre être tout entier, ne soit employé durant tous les instants de son existence qu’à cette seule et unique fin de « glorifier Dieu le plus possible » (ou, ce qui revient au même, de procurer « le bien de Dieu », d’« accomplir la volonté de Dieu », de « procurer la manifestation de la gloire de Dieu » autant que cela nous est possible[1].)
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« Aime ton prochain comme toi-même »…

Que Vous nous aimez, mon Dieu, que Vous aimez tous les hommes ! Vous qui donnez comme deuxième commandement, comme commandement le plus important après celui de Vous aimer, le commandement d’aimer tous les hommes !.. Vous les aimez tant, que la chose que Vous prescrivez le plus fortement, après de Vous aimer Vous-même, c’est de les aimer !.. Mon Dieu, Vous était-il possible, tout Dieu que Vous êtes, de montrer d’une manière plus évidente, plus forte et plus suave combien Vous aimez les hommes, que Vous ne le faites en déclarant si hautement qu’après le devoir de Vous aimer, le devoir que Vous nous imposez le plus rigoureusement, le plus sévèrement, c’est d’aimer tous les hommes !
Aimons tous les hommes comme nous nous aimons nous-mêmes… En effet, nous avons exactement les mêmes motifs d’aimer les autres que de nous aimer ; de ces mêmes motifs doit naître un même effet… Bien au-dessus de tous les motifs de bonté, de beauté, de perfection personnelle qui peuvent nous faire aimer les hommes, des motifs de parenté, de connaissance, de gratitude, de tous les motifs provenant des sens, bien plus puissants qu’eux sont les motifs d’aimer les hommes qui viennent de leurs relations avec Dieu ; et ces derniers motifs sont la plupart les mêmes pour tous les hommes ; trois d’entre les principaux sont : 1° que Dieu, Père de tous les hommes, les aime tous avec un amour extrême, et veut voir régner entre eux tous cette même tendresse, cette même affection, cette paix et cette union que tout père très tendre veut voir régner entre ses enfants ; 2° que tous les hommes sont membres du Christ, comme faisant partie de son corps, soit à titre de matière prochaine, soit à titre de matière éloignée, que, par conséquent, tous sont une portion de Jésus, sont quelque chose de Jésus, sont une partie de Jésus ; 3° que Jésus est mort pour tous les hommes, que chacun représente le prix de son sang, et doit nous apparaître couvert de son sang comme d’un manteau… Tous ces motifs revêtent tous les hommes, sans exception, d’une dignité incomparable, le rendent un objet sacré, saint, vénérable, digne d’un amour extrême, d’un religieux respect, d’un véritable culte… A côté de ces relations avec Dieu qui nous rendent tous les hommes également sacrés, aimables et vénérables, il y a d’autres relations avec Dieu qui, s’ajoutant aux premières, donnent à certains d’entre eux un caractère encore plus auguste ; ce sont celles qui distinguent les chrétiens et surtout les catholiques, et surtout ceux qui s’approchent souvent du sacrement de l’Eucharistie, et en premier lieu les prêtres, et entre tous le souverain pontifie… Tous les baptisés sont frères de Jésus et ses cohéritiers à un titre tout spécial ; tous les catholiques vivent de la vie de l’Esprit Saint qui anime l’Église… Ceux qui reçoivent la Sainte Eucharistie sont sacrés comme des tabernacles et des saints ciboires… Les prêtres, les évêques et surtout le Souverain Pontife sont d’une manière toute particulière les représentants de Dieu sur la terre… Nous devons aimer tous les hommes comme nous-mêmes ; mais certains, comme on le voit, méritent à cause de leurs relations particulièrement étroites avec Dieu, plus d’amour et de vénération encore que les autres… bien que tous en méritent une pour ainsi dire infinie, pour le deuxième motif que nous avons indiqué, celui qui nous fait voir en tous des membres de Jésus, des portions de Son Corps, des parties de Lui-même [2].

[1] M/232, sur Mc 12,18-30, en C. DE FOUCAULD, La bonté de Dieu. Méditations sur les Saints Évangiles (1), Nouvelle Cité, Montrouge 1996, 170-172.
[2] M/233, sur Mc 12,31, en C. DE FOUCAULD, La bonté de Dieu. Méditations sur les Saints Évangiles (1), Nouvelle Cité, Montrouge 1996, 172-174.